Prestige ancien du port de Dahouët

Bien qu’enfermé dans un cadre géographique restreint le port de Dahouët n’en a pas moins au cours des siècles joué un rôle important comme débouché maritime de Lamballe capitale du Penthièvre, fleuron du Duché indépendant de Bretagne et rivale alors de Saint-Malo qui ne possédait en ce temps, comme elle, que 1700 habitants et des installations portuaires réduites, et plus importante que Brest avec ses 1200 habitants. Il faut dire qu’en ce temps les navires avaient un tonnage plus réduit et devaient se prêter à l’échouage dans des ports avec installations sommaires.

Au moment du retrait momentané de Saint-Malo de la Bretagne entre 1380 et 1400 sur trente navires bretons, eux-mêmes sur trente-six navires étrangers recensés (Custom rolls) dans les ports d’Angleterre du Sud-Ouest on en trouve treize provenant de Dahouët. Lamballe est une ville industrielle mais qui souffrira beaucoup des guerres de la Ligue, ne s’étant pas rangée à temps.

L’engagement dans la pêche morutière outre atlantique est précoce comme dans toute la baie de Saint Brieuc, apparemment antérieure aux voyages de Christophe Colomb si on en croit les affirmations d’une chartre de l’abbaye de Beauport qui réclame en 1514 une taxe due sur la pêche d’Islande et de Terre Neuve depuis soixante ans. Depuis le milieu du XV ème siècle en effet on constate une déchéance des pêcheries sècheries de la côte armoricaine devant la concurrence des pêches lointaines. Les voyages se font vers la ‘Terre aux Bretons’ dont la découverte est dite, par les rois de France pour justifier leurs installations vis-à-vis des Espagnols en Floride, avoir été faite par les Armoricains. Il en reste le Cap Breton du Canada.

Toujours est-il qu’en 1510 la Jaquette de Daouët en la parouesse de Pléneuc est l’un des deux premiers navires Terreneuviers européens connus, l’autre étant un voisin, la Bonadventure de Bréhat. Et la suite est aussi fournie ce qui prouve l’engagement très précoce des Bretons outre Atlantique, au point qu’à la même époque 1510 c’est chez eux et non chez ses voisins basques que Jeanne d’Aragon demande de prendre deux pilotes pour aller reconnaitre les Terres Neuves.

En raison de l’effacement de Lamballe suite aux destructions causées par sa fidélité à ses engagements lors des guerres de la Ligue, Dahouët devra, faute de capitaux, avoir un rôle secondaire à la pêche à Terre-Neuve au dix-neuvième siècle et bientôt se tourner vers Islande moins coûteuse où il fut deux fois le deuxième port breton en nombre de navires après Paimpol. Mais au temps de la grande pêche, après livraison de la morue dans les ports ibériques ou méditerranéens puis Bordeaux, les navires occupaient l’arrière-saison au cabotage si bien qu’il était rare d’en trouver un grand nombre à séjourner dans le port.

Le cabotage pour l’exportation des produits du sol céréales et surtout pommes de terre avait pris la place du commerce moyenâgeux des produits manufacturés de Lamballe, des toiles, des cuirs, du blé, du vin de Bordeaux pour l’Angleterre. De Lisbonne où se livraient les patates, les navires ramenaient le sel pour la grande pêche. En 1904 Dahouët fit le tonnage le plus important des pommes de terre du département et comme le département était parmi les plus actifs de France dans cette denrée, on peut supposer son rôle important.

Les deux fours à chaux du port recevaient les pierres calcaires nécessaires du port normand de Regnéville, le transport de la chaux vive s’avérant très dangereuse par mer, toute une noria de lougres fournissait les ports de la baie de Saint-Brieuc à partir de la Basse Normandie.

J.G.